Comme beaucoup de parents, nous nous étions attelés à aménager et décorer une jolie chambre pour bébé. Bien décidés à ce que notre enfant dorme dans sa chambre. Son lit était prêt: un drap propre et une turbulette, point barre! Mais voilà, au retour de la maternité, rien ne s'est passé comme prévu...
Je vous témoigne ici notre expérience autour du cododo ainsi que les règles à suivre pour le pratiquer en toute sécurité.
1. Le cododo, c'est quoi?
Vous entendrez parler de cododo, de co-sleeping ou encore de sommeil partagé. Ces termes signifient la même chose, à savoir partager son lit avec son enfant. Votre bébé est à même votre matelas ou dans un lit cododo collé et ouvert sur votre lit.
Si cette pratique est encore décriée dans nos pays occidentaux, ce n'est pas le cas partout. En effet, en Asie, Afrique, Océanie ou encore dans les pays Scandinaves, le cododo est une pratique courante. Les notions de chambre, de lit parental ou familial sont en fait définis par nos cultures.
La preuve aujourd'hui, la pédagogie Montessori nous invite à faire dormir nos enfants sur des matelas à même le sol pour favoriser l'autonomie. Toutefois je ne vois pas beaucoup de parents (dont nous) pratiquer ce même couchage dans leur propre chambre. Je l'avoue ça ne m'a même pas traversé l'esprit. En préparant la future chambre de bébé nous avons nous même opté pour un lit à barreau. Nous n'étions mentalement pas encore prêt pour ce bouleversement culturel ci. Il faut aussi savoir s'écouter pour être à l'aise avec ce qu'on propose à notre enfant. Il n'y pas une seule façon de "bien" s'occuper de son enfant!
Revenons à nos moutons et prenons un peu de recul pour comprendre l’intérêt du cododo.
1.1 Ce que nous dit l'OMS
L'Organisation Mondiale de la Santé, recommande de faire dormir l'enfant de moins de 6 mois dans la chambre parentale. Que l'enfant dorme dans son propre lit ou dans un lit cododo, la proximité des parents avec l'enfant réduit le risque de mort subite du nourrisson. En effet les parents sont plus alertes et peuvent réagir plus rapidement en cas de problème.
1.2 Le cododo et l'allaitement
Nous l'avons vu dans de précédents articles sur l'allaitement, donner le sein à la demande et aux signes d'éveils permet à la lactation de se mettre en place. Le sommeil partagé facilite les tétées de nuit grâce à la proximité mère/bébé. Rappelons que les premières semaines d'allaitement, les tétées de nuit sont les plus importantes. En effet le pic hormonal a lieu entre 4 et 6 heures du matin. Plus la demande est importante à ce moment là et plus votre corps produira de lait.
En cododo, la maman allaitante est plus attentive aux signes d'éveils de son bébé (oui même en dormant), la proximité lui permet de mettre son enfant plus facilement au sein et de se rendormir plus rapidement par la suite. Finalement le cododo, c'est bon pour le sommeil de l'enfant, mais aussi pour celui de la maman!
2. Bon pour l'enfant?
2.1 S'attacher pour mieux se séparer
Imaginez ce petit bébé, tout juste sorti du ventre tout chaud de sa mère. Il flottait paisiblement dans son bain à 37°C, la lumière était tamisée, il entendait la douce musique des battements cardiaques de sa mère et les bruits extérieurs en sourdine. D'un seul coup, tout change! Les bruits sont forts et ne ressemblent en rien à ce qu'il connaît, la lumière est éblouissante, il fait froid. Il est séparé de sa maman, de son cocon.
Notre société occidentale lui dit alors: sois autonome, dors dans ta chambre, bois ton lait au biberon, ne pleur pas et fais ce que je te dis! Pendant longtemps, nous avons pensé que pour devenir autonome, l'enfant devait être séparé affectivement le plus possible de ses parents. La proximité le rendant dépendant.
Nous savons aujourd'hui que c'est en fait le contraire. Plus son lien parent/enfant sera fort, plus il se sentira sécurisé, écouté, valorisé. Il se sentira alors capable d'expérimenter, de tester et de s'autonomiser. Notre rôle de parent est donc de s'adapter aux besoins de notre enfant et non l'inverse pour favoriser son autonomie.
2.2 S'adapter aux besoins de notre enfant
Chaque enfant est différent, tout comme ses besoins et la façon de les exprimer. Toutefois, au vu du bouleversement qu'il a traversé lors de la naissance, il semble que le besoin de proximité soit universel. Certains bébés vous manifesteront ce besoin impérieux d'être porté, d'être contre vous, de vous sentir.
Chaque bébé manifeste ce besoin à sa façon. Certains bébés s'endormiront paisiblement seuls dans leurs lits, accepteront d'être posés au sol ou dans un transat. Pour d'autres cette séparation semble être insupportable et douloureuse. Lorsque votre bébé manifeste ce mal être par des pleurs, il ne fait pas un "caprice". Il n'a pas la faculté d'anticiper nos actions. Il ressent et il exprime.
C'était le cas de Joséphine. Les deux premiers mois de sa vie, elle s'endormait uniquement sur nous, ne supportait être au sol que cinq minutes maximum. Idem la nuit. Elle ne se laissait aller à s'endormir qu'allongée sur nous.
Observer et écouter votre enfant vous permettra de comprendre ses besoins et d'adapter vos gestes.
3. Le cododo oui, mais dans les règles
3.1 Coucher son enfant en sécurité
Sur un matelas au sol, dans un lit à barreau ou en cododo, les règles de couchage pour un nouveau-né sont toujours les mêmes:
La température de la chambre est comprise entre 18 et 20°C maximum
Bébé dort sur le dos: la mise en place de cette mesure a permis de réduire de 75% les morts inattendues du nourrisson entre 1991 et 1997.
Le lit de bébé, quant à lui, est composé de deux choses:
Un matelas ferme
Une turbulette adaptée à la température extérieure
C'est tout! Pas d'oreiller anti tête plate, pas de tour de lit, pas de couverture, pas de doudous, rien! Vous allez faire de sacrés économies!
3.2 Les risques du cododo
Il est primordial de rappeler que le cododo n'est pas sans risques si les règles ne sont pas respectées.
Le risque d'hyperthermie: le nourrisson peine à réguler sa propre température. En cododo, vous agissez comme un radiateur à ses côtés. Il peut alors souffrir d'hyperthermie.
Le risque de chute
Le risque d'étouffement: En effet une étude britannique menée en 2013, a montré que le cododo multipliait par 5 le risque de mort inattendue du nourrisson des bébés de moins de 3 mois. Ce risque est lié à plusieurs facteurs:
- Étouffement causé par un défaut d'installation; présence d'une couette ou de coussin, lit positionné contre le mur (l'enfant peut glisser entre le lit et le mur et se retrouver coincé)
- Étouffement causé par le parent: l'obésité, le tabagisme et la consommation d'alcool ou de drogue sont responsables de la diminution de la vigilance du parent.
Donc le cododo pourquoi pas, mais seulement si on respecte les règles de sécurité!
3.3 Les règles à suivre pour cododoter en sécurité
L'enfant dort sur le dos
La température de la chambre est comprise entre 18 et 20°C
L'enfant dort dans sa turbulette
Le matelas est ferme
Le côté du lit n'est pas collé contre un mur
Les oreillers sont retirés
Il n'y a pas de draps ou de couette
Aucun des parents ne souffrent d'obésité
Aucun des parents ne fume, n'a consommé d'alcool ou de drogue
Vous l'avez compris les règles sont strictes. Il semble que le meilleur compromis soit le lit cododo. Il s'agit d'un berceau dont la hauteur s'adapte à celle de votre lit. Ouvert sur votre lit, il vous permet de créer un espace sécurisé pour votre bébé en continuité de votre matelas. Attention tout de même à ce que votre couette ne puisse pas glisser sur l'enfant.
4. Notre expérience du cododo
4.1 Les besoins de Joséphine
Comme dit en introduction, avant sa naissance, nous ne pensions pas dormir avec Joséphine. Nous lui avions préparé sa chambre avec un lit aux normes OMS! Nous avions mis de côté le berceau en bois qui appartenait au grand père de Joséphine, "au cas où"!
A peine rentrés de la maternité, notre "au cas où" s'est retrouvé monté à côté de notre lit... Je ne me voyais pas me séparer de cette si petite chose de 2 kilos 300. Il s'est avéré que Joséphine non plus. Malgré son bonnet et ses multiples couches, elle n'arrivait pas à se réchauffer. Si petite, elle ne prenait pas le sein de manière efficace. Les tétées duraient parfois 45 minutes. Joséphine avait besoin de contact, pour se rassurer, pour se réchauffer, pour se retrouver. Très rapidement elle nous a donc rejoint dans notre lit. Elle a dormi sur moi les deux premiers mois, puis à côté, puis de plus en plus loin. Elle n'acceptait de dormir dans son lit que pour les siestes et en mon absence.
A 6 mois, elle réclamait le sein parfois toutes les heures la nuit. Plusieurs fois nous avons essayé de la coucher dans sa chambre, mais au bout de trois allers-retour, je revenais me coucher, bébé sous le bras.
Nous avons attendu qu'elle soit prête. A 10 mois, Joséphine se retournait dans tous les sens. Elle n'avait jamais assez de place et nous le faisait comprendre. Les réveils nocturnes donnaient lieu à des parties de trampoline et d'escalade. Elle était prête à avoir son espace! Cela ne signifie pas qu'elle ne me réclamait plus la nuit. Mais elle dormait dans son lit, paisiblement.
A 15 mois, nous commençons à avoir les prémisses de nuits complètes sans appels nocturnes. Enfin!
Je vous invite à lire l'article sur le train du sommeil, pour comprendre ce qu'est une nuit d'enfant.
4.2 Mon regard de maman allaitante
Alors que je ne m'y attendais pas, le cododo a été finalement une évidence. Mon regard et ressenti sur cette pratique a évolué au fil des mois. Je distingue deux temps particuliers sur ces 10 mois de cododo:
Le temps du congé maternité et de la mise en place de l'allaitement: Joséphine est née avec un retard de croissance. J'ai appris à connaître ses besoins particuliers: se réchauffer, se nourrir, se réconforter. Notre cododo s'est installé naturellement. Nous avions besoin de cette proximité. Elle pour se réchauffer et moi pour mettre en place l'allaitement. Ce qui se jouait à ce moment là: la création de notre lien mère-enfant. Nous avons passé ces deux mois et demis collés serrés. Le cododo n'a été que la suite logique de ce lien fusionnel.
La reprise du travail: cette séparation a été difficile à vivre pour nous deux. Séparées plus de 11 heures par jour, nous nous rattrapions le soir et la nuit. Collées comme deux aimants. Nous en avions besoin toutes les deux, c'était viscéral et même vital. Lorsque, épuisée par les réveils répétés (toutes les heures) de Joséphine la nuit pour téter, nous essayions de la coucher dans son lit (elle avait plus de 6 mois). Je ressentais une grande tristesse. J'ai mis du temps avant de comprendre que je n'étais pas prête, moi non plus, à me séparer d'elle la nuit. C'est finalement l'arrêt de mon travail qui nous a permis de nous retrouver la journée et de pouvoir nous séparer la nuit en toute sérénité.
4.3 Et papa dans tout ça?
Papa non plus ne pensait pas au cododo. Je crois qu'il n'avait pas connaissance de ce terme avant d'y être confronté. Pour lui aussi cela s'est fait tout naturellement. Soucieux de soulager les pleurs de Joséphine, il a vite compris qu'elle avait besoin d'être contre nous. Le portage et le cododo ont été une évidence.
Il y voyait là un moyen de me soutenir dans la mise en place difficile de l'allaitement et de me permettre de me reposer le plus possible. Mais aussi d'en profiter pour créer un lien particulier père/enfant.
Pour écrire ce paragraphe, je lui ai posé quelques questions. A ma grande surprise il m'a révélé la seule ombre au tableau. Non ce n'est pas le fait de partager son lit conjugale et sa femme avec un petit être de moins de trois kilos.
Ce qui lui a fait de la peine, c'est le discours culpabilisant rabâché aux papas au sujet du cododo. A savoir: "Ne mettez pas le bébé à côté du papa, il risquerait de l'écraser dans son sommeil car il n'est pas aussi vigilant que la maman." C'est ce sentiment d'être "moins capable" qui lui faisait de la peine. Il est vrai que les premiers mois, je positionnais toujours Joséphine au bord du lit et contre moi afin de respecter les règles de sécurité. Dès que Joséphine a su se retourner seule, nous l'avons installé entre nous. Papa était alors heureux de pouvoir la regarder dormir, de la sentir et d'entendre son petit souffle. D'avoir la main de sa fille qui cherchait à le toucher en dormant...
Conclusion
Le cododo est un moment de partage et de fusion. En écrivant mon ressenti j'ai d'ailleurs eu du mal à dire "je" plutôt que "nous". En effet le cododo a été pour nous un élément majeur dans la création de notre lien parents-enfant. Cette fusion que je ressentais, naissait aussi pour le papa de Joséphine qui partageait ces temps uniques.
Une fois les règles bien respectées, le cododo n'est qu'une affaire de choix. Il n'est ni obligatoire, ni indispensable. Tout dépend des besoins de votre enfant et de ce qui est faisable pour vous. La priorité pour votre enfant: que vous soyez serein avec vos pratiques. Pas d'inquiétudes, lorsque votre enfant sera prêt il ira dormir dans son lit, dans son espace à lui.
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